Le 30 novembre, la commission des finances du Sénat a examiné trois propositions de loi identiques, déposées par les trois groupes de gauche du Parlement et relatives à la compensation des allocations individuelles de solidarité versées par les départements. Il s'agit en fait du texte correspondant à la proposition de loi élaborée par l'Assemblée des départements de France (voir nos articles ci-contre des 30 et 31 août 2010).
A l'issue de sa réunion, la commission des finances "a décidé de ne pas adopter de texte afin que la discussion en séance publique porte sur le texte des propositions de loi. Elle a décidé également de demander au Sénat de ne pas adopter les articles des propositions de loi et de rejeter celles-ci". Si ce rejet - qui devrait être confirmé en séance le 9 décembre - n'est pas vraiment une surprise, il est néanmoins intéressant de se pencher sur ses motivations.
Présenté par Charles Guéné, sénateur (UMP) de la Haute-Marne, le rapport de la commission des finances ne méconnaît pas l'impact sur les finances des départements des trois principales allocations de solidarité : le RMI puis le revenu de solidarité active (RSA), l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) et la prestation de compensation du handicap (PCH). Il admet notamment que le financement de ces trois prestations "s'inscrit dans un contexte financier d'autant plus difficile pour les départements que l'évolution de leurs ressources a connu une décélération sensible, les confrontant ainsi à un 'effet de ciseaux' entre leurs recettes et leurs dépenses". Cette évolution a en outre été aggravée, ces dernières années, par la réduction des marges de manoeuvre induites par la réforme de la taxe professionnelle et par "l'effondrement des recettes de droits de mutation à titre onéreux [-33% entre 2007 et 2009, ndlr], dont la part est élevée dans les budgets départementaux puisqu'elles représentaient, en 2008, 19,9% de l'ensemble de leurs recettes fiscales". Si le rapporteur et la commission des finances du Sénat partagent ainsi le constat qui a présidé à l'élaboration de la proposition de loi, il n'en va pas de même pour les conclusions à en tirer.
Ne pas "court-circuiter" les réformes en cours
Ainsi, le rapporteur et la commission des finances jugent que la proposition de loi constitue "un dispositif inadapté". Ils avancent quatre raisons principales pour justifier cette position. La première est que la proposition vise essentiellement la prise en charge de la dépendance (plus de 80% du reste à charge), l'évolution des dépenses de RMI/RSA étant liée avant tout à la situation économique et ayant bénéficié d'une période de ralentissement entre 2005 et 2009. Or - et c'est la seconde raison - le rapporteur souligne la nécessité de ne pas "court-circuiter" les réformes en cours, à commencer par le débat qui doit s'ouvrir sur la dépendance, en vue de la mise en place d'un cinquième risque.
Le rapporteur estime également qu'il ne faut pas remettre en cause - à travers la proposition de loi - la décentralisation de la mise en oeuvre des politiques de solidarité. Il rappelle notamment que "la proposition de compenser les dépenses départementales au titre de l'APA à hauteur de 90% ne paraît pas conforme à la clef de répartition envisagée lors de la création de cette allocation" [en janvier 2002, par le gouvernement de Lionel Jospin, ndlr]. Pour le rapporteur, les propositions formulées par les trois textes "iraient toutes dans le sens d'une déresponsabilisation des départements dans la gestion des allocations". Enfin, le dernier argument est d'ordre budgétaire : le coût de la proposition de loi pour l'Etat serait - d'après les calculs du rapporteur - de l'ordre de 3,34 milliards d'euros. Or un tel coût "ne peut être pris en charge dans le contexte actuel des finances publiques".
Référence : proposition de loi relative à la compensation des allocations individuelles de solidarité versées par les départements.
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