Après avoir - brillamment - décrypté 40 ans d'évolution des prix du logement (voir notre article ci-contre du 4 mai 2011) et s'être penché sur la rénovation de la fiscalité de l'habitat et son impact sur la mobilité résidentielle (voir notre article ci-contre du 12 octobre 2010), le Centre d'analyse stratégique (CAS) publie une nouvelle note intitulée "Le logement social pour qui ? Perspectives européennes". Si ce document apporte effectivement, à titre d'illustrations, quelques éclairages sur des exemples européens, l'essentiel de son contenu est toutefois consacré à l'amélioration du système d'allocation des logements sociaux et de la mobilité dans le parc social français, dont le CAS rappelle qu'il est l'un des plus importants d'Europe avec 4,5 millions d'unités.
La note part d'un constat : la mobilité résidentielle - qui est aussi un des facteurs de la mobilité professionnelle - progresse dans le parc locatif privé, mais elle diminue dans le parc social. L'écart est désormais du simple au double, avec des taux de mobilité respectifs de 18% et de 9%. Pour le CAS, "l'inadéquation de l'offre et de la demande rend d'autant plus aigu le problème de l'accès au logement social, en particulier la détermination du public cible pouvant y prétendre".
Lever les freins à la mobilité et lutter contre les discriminations
Face à cette situation, la note préconise de mettre en œuvre un certain nombre de mesures, regroupées en trois grandes thématiques. La première concerne les moyens permettant de "lever les freins à la mobilité". Le CAS en voit trois principaux. Il propose tout d'abord d'étendre le mécanisme du surloyer, mis en œuvre par la loi du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion - dite aussi loi Molle ou loi Boutin (voir nos articles ci-contre du 4 août et du 25 septembre 2009) - et d'en évaluer les effets. Allant plus loin que le surloyer, il suggère aussi d'expérimenter, en Ile-de-France, un dispositif d'indexation des loyers HLM sur les revenus des ménages. Si les résultats se révèlent probants, ce mécanisme pourrait ensuite faire l'objet d'une extension à d'autres zones tendues en matière de logement. Enfin, il s'agirait de donner la priorité aux mutations internes dans l'attribution des logements sociaux, afin de développer la mobilité à l'intérieur du parc.
Un second groupe de préconisations vise à "promouvoir la mixité sociale et lutter contre les discriminations". Selon le CAS, l'opacité et la complexité du système - malgré le progrès que constitue l'introduction du formulaire unique de demande -, l'absence d'outils de suivi statistique fiables et la mise en œuvre "de critères d'attribution multiples et parfois contradictoires" ne permettent pas d'atteindre ces objectifs. La note pointe même "des pratiques potentiellement discriminatoires, parfois au nom de la mixité sociale". Pour sortir de cette impasse, les mesures préconisées sont cependant assez timides et ont déjà été formulées à plusieurs reprises : rappeler leurs obligations aux acteurs impliqués dans l'attribution des logements sociaux et étendre et évaluer les expériences d'anonymisation des demandes de logement.
Un système d'attribution plus transparent
La troisième thématique abordée par la note consiste à rendre plus transparent le système d'attribution des logements sociaux. Pour cela, le CAS propose de s'inspirer du Choice Based Lettings (CBL), mis en place aux Pays-Bas et au Royaume-Uni et qui combine large publicité sur les logements disponibles et système de points calculés en fonction de critères clairement exposés par les bailleurs. La note s'attarde également sur le dispositif de cotation de demandes, expérimenté sur le territoire de Rennes Métropole et qui repose, lui aussi, sur une grille de cotation par points. Afin de favoriser la mobilité, le CAS propose également d'inclure cette dernière dans les critères pris en compte pour établir la cotation.
L'Union sociale pour l'habitat (USH) a vivement réagi à la parution de la note du Centre d'analyse stratégique. Tout en reconnaissant l'intérêt de l'étude, elle critique notamment "les références à des travaux dépourvus de toute rigueur scientifique qui portent sur les discriminations ethniques, alors que le parc HLM accueille 30% des immigrés pour 16% de la population française et que le secteur HLM a mis au point des outils de prévention des discriminations reconnus par la Halde". L'USH conteste également la perspective de logements HLM qui seraient dédiés à l'accueil des ménages les plus pauvres, "alors que la vocation du parc social, bien au contraire, est d'éviter à tout prix de ghettoïser une partie de la population".
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