Par un arrêt en date du 30 juillet 2010 qui sera mentionné aux tables du recueil Lebon, le Conseil d’Etat est venu mettre un terme à des divergences d’interprétation de l’article L.520-2 du Code de l’urbanisme, qui pose comme principe que l'avis de mise en recouvrement de la redevance pour création de bureaux, perçue selon les dispositions de l’article L.520-1 du même code à l'occasion de la construction de locaux à usage de bureaux et de locaux de recherche ainsi que de leurs annexes en Ile-de-France, doit être émis dans les deux ans qui suivent soit la délivrance du permis de construire, soit la non-opposition à la déclaration préalable de travaux, soit le dépôt de la déclaration de transformation de locaux en bureaux, soit, à défaut, le début des travaux.
Les difficultés d’interprétation de cet article ressortent de l’omission de mentionner explicitement le cas où les locaux auraient été construits ou transformés illégalement, c'est-à-dire sans la déclaration nécessaire ou la délivrance d’un permis de construire alors qu’elle serait exigée par la réglementation en vigueur.
Pour déterminer le point de départ de cette prescription, deux visions s’opposaient : d’une part, celle issue de la circulaire n°86-12 du 31 janvier 1986 relative au régime de cette redevance qui pose comme point de départ, de la prescription biennale de l’article L. 520-2 du Code de l'urbanisme, le procès-verbal constatant une infraction aux prescriptions légales, et, d’autre part, celle issue d’un courant doctrinal suivi en l’espèce par le tribunal administratif de Versailles qui avait jugé que le point de départ de cette prescription étant en réalité le début des travaux, celle-ci se trouvait acquise en faveur de la société requérante.
Le tribunal avait fait une lecture extensive des dispositions de l’article L.520-2 en ce qu’il énonce "à défaut, le début des travaux", interprétant cette disposition comme comprenant ainsi à la fois deux hypothèses, soit "à défaut d’obligation d’obtenir une autorisation" et "à défaut d’obtention d’une autorisation en violation des textes". L’Etat a contesté cette interprétation devant le Conseil d’Etat qui lui a donné raison en estimant qu’à la lumière des travaux parlementaires afférents à la loi du 3 décembre 1982 portant réforme de la redevance pour création de locaux à usage de bureaux et à usage industriel en région Ile-de-France, l’article L.520-2 du Code de l'urbanisme n’avait pas entendu prévoir le cas où de telles constructions étaient édifiées ou des locaux précédemment affectés à un autre usage étaient transformés "en méconnaissance des dispositions imposant l’obtention d’un permis de construire ou le dépôt d’une déclaration, mais seulement les cas dans lesquels aucun texte ne requiert l’obtention d’un tel permis ou le dépôt d’une telle déclaration".
Selon la Haute Juridiction, l’article L.520-2 du code de l'urbanisme n’est donc tout simplement pas applicable, tant en ce qu’il prévoit le point de départ de la prescription que sa durée de deux ans. A défaut, seul trouve à s’appliquer en l’espèce l’article L.186 du Livre des procédures fiscales, applicable aux délais venant expirer après le 31 décembre 2008 et selon lequel "lorsqu'il n'est pas expressément prévu de délai de prescription plus court ou plus long, le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à l'expiration de la sixième année suivant celle du fait générateur de l'impôt".
Le fait générateur de la prescription n’est donc ni le début des travaux, ni le procès-verbal d’infraction, mais l’achèvement des travaux, et le délai d’acquisition de cette prescription n’est pas de deux ans mais de six. Ainsi, il est fait droit à la demande du ministère d’annuler le jugement du tribunal administratif de Versailles, devant lequel le Conseil d’Etat renvoie l’affaire pour être rejugée à la lumière de cette analyse.
Fanny Morisseau, Avocat à la Cour / Cabinet de Castelnau
Référence : Conseil d’état, 30 juillet 2010, ministère de l’Ecologie, du Développement et de l’Aménagement durables c/société Unibail Holding, n°312204.
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