En 2009, l’expérimentation des schémas régionaux de développement économique (SRDE) a pris fin. Créés par la loi de décentralisation du 13 août 2004 à titre expérimental pour une durée de cinq ans, ces documents devaient permettre de coordonner les actions de développement économique sur le territoire régional, de définir les orientations stratégiques de la région en matière économique et de prévenir les risques d’atteinte à l’équilibre économique de tout ou partie de la région. Après cinq ans d’existence, leur bilan est plutôt bon. "L’expérimentation de SRDE élaborés après large concertation avec tous les acteurs régionaux est jugée très positivement par les conseils régionaux", assure ainsi l’Association des régions de France (ARF) dans son bilan des SRDE du 5 juillet 2010. Parmi les principaux acquis : l’affirmation du rôle de la région. "Le SRDE a permis de symboliser et d’asseoir le rôle de la région en tant que chef de file pour un développement économique durable", souligne le rapport de l’ARF. "Les régions ont pris possession de leur rôle économique", explique pour sa part Juliette Hubert, du cabinet Asterès. Et quand on interroge les régions, elles partagent le même constat. "La région est reconnue comme coordinateur de l’action de politique publique économique, en termes financiers, elle a un rôle de chef de file", assure Yannick Giry, directeur adjoint de l’action économique au conseil régional du Nord-Pas-de-Calais. Autre point positif du SRDE : la nouvelle gouvernance régionale de l’action économique qu’il implique. Avant d’établir son SRDE, chaque région a dû réaliser un diagnostic partagé. Une démarche d’élaboration qui a "permis de fédérer les énergies des différents acteurs autour de stratégies communes, de mettre en cohérence, simplifier, rendre plus lisible et répondre ainsi à la demande des acteurs économiques", souligne l’ARF. Un avis que partage Yannick Giry : "Le plus, c’est la gouvernance mise en place. Elle est très collective avec les chambres consulaires, l’ensemble des territoires, les partenaires sociaux, l’Etat. On se voit tous les six mois pour faire le point sur les actions économiques mises en oeuvre. On a en gros créé une méthode pour coordonner l’intervention des uns et des autres." De son côté, Jean-Noël Salmon, chargé de mission à la région Rhône-Alpes, estime que le SRDE est davantage une méthode d’action et de coopération avec les autres collectivités qu’un catalogue d’actions. "Cela a le mérite de mettre les choses à plat avec les départements, métropoles, agglomérations et villes, et de clarifier", assure Juliette Hubert. Pourtant ce n’était pas gagné. L’ARF reprochait notamment à l’Etat d’avoir imposé un dispositif sans concertation, et avait largement critiqué son caractère non prescriptif. "La méthode vient du fait que le SRDE n’est pas prescriptif : cela oblige à énormément de concertation. Au final, on a gagné une certaine efficacité", assure Yannick Giry.
Un nouveau mode de gouvernance
L’articulation du SRDE avec les autres politiques régionales (formation professionnelle, enseignement supérieur, recherche, aménagement du territoire) a également été perçue positivement. En matière d’aides aux entreprises, les SRDE ont aussi "mis en évidence le besoin de simplifier, de mieux articuler et de rendre plus efficaces les dispositifs, explique l’ARF dans son rapport. Les régions ont ainsi corrigé dès 2007 les remarques ultérieurement pointées par la Cour des comptes sur le foisonnement d’aides". Les principales actions mises en oeuvre dans ce domaine : la réduction du nombre des aides, la création de portails d’information pour tous les moments de la vie de l’entreprise, des dossiers d’instruction uniques mis en place avec les départements et agglomérations, et le passage d’une logique de guichet à une logique de soutien aux projets avec des engagements concrets et mesurables de la part des porteurs de projets. "Avec la mise en oeuvre du SRDE, la région a développé de nouvelles façons d’agir en matière de développement économique et d’élaboration de nouveaux outils. On a ainsi transformé le paysage des aides avec plus de systèmes directs (garanties d’emprunt) ou des systèmes organisés par catégories d’entreprises", détaille ainsi Jean-Noël Salmon. Et Jean-Louis Gagnaire, vice-président du conseil régional de Rhône-Alpes délégué au développement économique, d’ajouter : "On a délégué les systèmes d’accompagnement avec des plateformes d’initiatives locales" pour éviter les traitements trop longs des dossiers. Au final, la plupart des régions comptent poursuivre la démarche initiée par les SRDE, même si ceux-ci ne sont plus obligatoires. Elle sont bien "décidées à poursuivre en signant, avec leurs partenaires, des contrats de développement économique régionaux pour les prochaines années", assure l’ARF, et cela, "quelle que soit la décision de l’Etat de proroger ou non ce cadre". S'il avait été question de prolonger l'expérimentation de un an en 2010, le gouvernement s'y était opposé, demandant aux préfets de dresser un bilan dont les conclusions sont toujours en attente. Alors les régions prennent les devants, comme Rhône-Alpes, qui commence à élaborer pour les cinq prochaines années une stratégie régionale de développement économique. "La première mouture de la SRDE est soumise à la critique des partenaires, mais on est d’accord sur les cinq axes stratégiques", précise Jean-Louis Gagnaire. Le texte doit être voté en février 2011. "Ce ne sera pas un pur produit des alambics de la région, mais elle va intégrer beaucoup d’entrées qui viennent d’ailleurs et la démarche est au moins aussi importante que ce qu’on va écrire au final. Alors que la loi ne l’imposait pas, on est un peu à la croisée des chemins, un rôle que plus personne sauf l’Etat ne conteste", estime Jean-Louis Gagnaire. Midi-Pyrénées vient elle aussi d'annoncer la préparation d’un SRDE, axé sur le soutien à l’innovation, malgré l’incertitude législative sur l’avenir de ce type de dispositif, d’après la déclaration de Martin Malvy, son président. Le SRDE devrait être présenté le 24 février 2011 lors d’assises régionales du développement économique territorial, de l’innovation et de la recherche. Le soutien à l’innovation sera le point fort de ce nouveau SRDE.
Les stratégies régionales de l’innovation suite des SRDE ?
L’innovation, une question développée dans les stratégies régionales de l’innovation (SRI) qui commencent à pointer leur nez, parallèlement aux SRDE. C’est la Commission européenne qui a encouragé les régions à se doter de telles stratégies dans le cadre des programmes opérationnels Feder (fonds européen de développement régional). A l’heure actuelle, toutes les régions en ont élaboré une et certaines la conçoivent comme un réel prolongement du SRDE. D'ailleurs, le commissaire à la Politique régionale, Johannes Hahn, en a fait une condition préalable au maintien des crédits "compétitivité" dans l'ensemble des régions lors de la future programmation 2014-2020. "Notre SRI est la suite du SRDE, explique Yannick Giry. Avec l’élargissement que l’on prépare du SRDE à la formation professionnelle, la santé au travail, la valorisation économique de la recherche et la SRI, on ouvre le périmètre du SRDE." Un avis que partage Juliette Hubert, dont le cabinet Asterès a réalisé une étude sur les SRI. "Le SRDE a été fait dans un premier temps, ensuite les SRI, à l’initiative de l’Union européenne. Pour la suite peut-être pourra-t-on faire les deux en même temps. La SRI est quant à elle souvent plus détaillée que le SRDE qui définit les grands axes." C'est la voie suivie par la région Ile-de-France qui prépare une stratégie régionale de développement économique et d’innovation (SRDEI) amenée à remplacer le SRDE. Mais au centre de ces stratégies reste une question : le positionnement des régions. "Si les régions ont la responsabilité de l’élaboration d’un SRDE, le chef de filat [sic] n’est pas abouti, rendant malaisé l’exercice de coordination des politiques économiques sur le territoire régional", souligne ainsi l’ARF, qui estime qu’il faut lancer une réflexion sur un nouveau partage des rôles en matière de développement économique. "Qu’on nous laisse faire et qu’on nous laisse décider", demande Jean-Louis Gagnaire. Schéma ou stratégie : il reste beaucoup à faire aux régions françaises pour rattraper leur retard. Seules deux d'entre elles (Ile-de-France et Languedoc-Roussillon) atteignent le seuil symbolique de 3% de PIB consacrés à la recherche et développement. Et comme le rappelle un bilan sur les stratégies régionales d'innovation des régions françaises présenté par la Commission en juillet dernier, "la France est classée au dixième rang des pays européens dans les tableaux de bord européens de l'innovation".
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